Jean Guidoni - Une Valse De 1937 Lyrics

Une Valse De 1937
Regarde le ciel est bleu au-dessus de Suresnes
Mon amour c'est dimanche et les beaux jours sont là
C'est tout exprès pour nous que la radio égrène
La rumba que Tino chante à Marinella

Quand pour monsieur Renault toute la journée on trime
Fin de semaine en peut bien comme font tous les braves gens
Se délasser gentiment et c'est pas un grand crime
D' rêver un peu d'amour et de frites à Nogent

Toi tu dis en t' moquant qu'avec ma belle gapette
Je prends un drôle de genre voyou à la Gabin
Mais que je dois si j' veux faire tout à l'heure ta conquête
Aux douches municipales me décrasser un brin

Car comme Blum l'a écrit il faut au prolétaire
De l'hygiène un vélo la route et des chansons
Le Tréport cet été sera notre Cythère
Ouvre donc Marie-Claire pour choisir nos caleçons

En attendant ma blonde entends-tu dans la ville
Mugir le défilé pour ceux de Guernica
Faut y aller et après on remont'ra à Belleville
Au ciné y'a un beau film avec Annabella

Tant qu'il restera un faubourg
Tant qu'il restera un dimanche
Et rien qu'une fille en robe blanche
On pourra vivre d'amour

Regarde le ciel est rouge sur le quartier Sverdlov
Mon amour c'est dimanche et les beaux jours sont là
Les haut-parleurs sont pleins de Leonid Outiossov
Accordéon greffé de balalaïka

Au grand métro de Moscou j' suis un stakhanoviste
Toi tu travailles au Goum et j' vois pas vraiment qui
Pourrait bien empêcher deux amants communistes
D'aller manger des glaces au parc Maxime Gorki

Et puis on s' baladera sur la Place Rouge en liesse
Pour crier nous aussi quelque nouveau slogan
Saluer nos aviateurs acclamer la jeunesse
Ou célébrer Pouchkine qu'est mort il y a cent ans

Staline l'a dit la vie est gaie elle est meilleure
Et tous nous répétons komsomols et soldats
Oui notre vie est belle comme le hurle le crieur
Ce gamin obstiné qui nous vend la Pravda

Avant de revenir au logement communautaire
Trop plein des réfugiés de Guadalajara
On ira au ciné voir des documentaires
Et le dernier succès de Lioubov Orlova

Tant qu'il restera un faubourg
Tant qu'il restera un dimanche
Et rien qu'une fille en robe blanche
On pourra vivre d'amour
Car on n'est pas venu sur cette planète
Pour n'être que des moins-que-rien
Et d'un coup de torchon ou de mitraillette
Être abattu seul comme un chien

Regarde le ciel est noir du côté Tempelhof
Mon amour c'est dimanche et les beaux jours sont là
Et puisque c'est mal vu d'écouter Claire Waldhoff
Remets donc ce schlager de Wiktor de Kowa ?

Parce que pour la Wehrmacht ça turbine à la chaîne
Chez Siemens cett' semaine on ne s'est pas amusé
Alors j'ai besoin de voir des roseaux et des chênes
Viens donc prendre un bol d'air au bord du Müggelsee

Tu n' trouves pas qu'on ressemble à des Arno Breker
A des aryens modèles tout nus sortant de l'eau7
Lis-moi les titres du Völkischer Beobachter
Pour voir s'il n'y a pas un peu d'ombre au tableau

C'est la Force par la Joie et pour la Volkswagen
Nous l'aurons quelque jour si pareils aux fourmis
Ponctuellement nous versons nos cinq marks par semaine
Demain sera radieux le Führer l'a promis

Si l'on veut que pour cent ans tous ses plans réussissent
Que triomphent à Madrid et Franco et Mola
Nous on devra se contenter de bière et de saucisses
Et de Zarah Leander dans La Habanera

Tant qu'il restera un faubourg
Tant qu'il restera un dimanche
Et rien qu'une fille en robe blanche
On pourra vivre d'amour
Car on n'est pas venu sur cette planète
Pour n'être que de moins-que-rien
Et d'un coup de torchon ou de mitraillette
Être abattu seul comme un chien

Moi si me trouvez un jour
Étendu entre quatre planches
Sous un nuage d'églantines blanches
Ce ne sera pas par bravoure
Ce ne sera pas pour la revanche
Enlevée au son des tambours
Mais ce sera sûrement un dimanche
Et je serai mort d'amour
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